Prologue — La politique du royaume

La situation sur Essos

Les cités libres ont toujours été une source conjointe d'émerveillement et de tensions pour les royaumes. Leur politique complexe et changeante déroute les seigneurs westerosis qui préfèrent en général s’en tenir éloignés. Cependant, les alliances de la Couronne avec différentes cités libres, leur implication dans la guerre de Dorne et plus récemment le projet de lord Lewys Piper de stabiliser cette région de trouble a créé de la curiosité pour l’orient.

L’ambitieux projet du seigneur de La Boucle a trouvé le soutien des seigneurs majeurs et celui de la Foi. De nombreux chevaliers, souvent des cadets de familles, se sont engagés aux côtés de l’inspirant Lord en rêvant de gloire et de richesse tandis que des septons et des septas prennent part à l’expédition pour répandre la parole des Sept.

Alors que les forces de lord Lewys Piper s’embarquent pour les terres d’Andalos pour sécuriser la région et protéger les voies de pèlerinage vers le lieu de naissance de la Foi des Sept, la cité de Pentos élève la voix. Contrôlant ces terres et réprouvant l’approche agressive des armées, elle se pose en partenaire de la Couronne et propose une solution plus pérenne et qui ne soit pas à son détriment : louer en Andalos des terres avec baux de 100 ans afin qu’y soient construites des forteresses. L’idée séduit et plusieurs seigneurs investissent pour la plus grande gloire du royaume et des Sept pour construire ce pied à terre.

Dans le même temps, les forces armées commencent à traquer les brigands et les troupes barbares qui écument la région. Rapidement, les ennemis les plus faibles sont repoussés vers le sud et l’est.

Après plusieurs lunes, alors que les travaux sur les forteresses commencent à peine, les forces armées s’impatientent, encouragées par les premières victoires faciles. Quelques tensions apparaissent avec la cité de Pentos : le prosélytisme des septons, les manières des soldats et des chevaliers qui ne respectent guère la cité et ses habitants et même quelques échauffourés avec des miliciens. Peu à peu les expéditions contre les ennemis de la couronne et de la Foi se font plus longues et plus lointaines.

Les cités de l’ancienne triarchie, Myr, Tyrosh et Lys, au sud de Pentos, commencent à montrer des signes d’inquiétude quant à l’ampleur que prend l’action de lord Lewys Piper, d’autant que Tyrosh et Lys sont des alliés, militaires et économiques, de la Couronne. Tandis que ser Alyn Velaryon et ses seconds, messire Corren Tallwy et dame Aenael Deddings, déploient des trésors d’ingéniosité pour rassurer leurs partenaires essosis, la cité de Myr envoie des émissaires à Pentos leur demandant de revenir sur les baux qu’ils ont accordés, jugeant trop périlleux que Westeros, maintenant unifié sous un roi valyrien, possède un pied-à-terre en Essos.

Plusieurs personnes s’illustrent sur ce front. La plus remarquable est sûrement lady Aelyse Arryn. Accompagnant les troupes du Val, elle prend part à tous les aspects de la campagne : elle chevauche en armure avec ses hommes, négocie aux côtés de lord Lewys Piper avec les cités libres, s’occupe des blessés westerosis et essosis et organise des offices religieux avec les septons pour maintenir la valeur morale des troupes. Auréolée par sa ferveur et révérée comme bénie des Sept, sa simple présence confirme pour certains la justesse de leur cause.

L’ascension de la Foi

Le règne du roi Baelor marque un nouvel essor de la Foi des Sept. Le peuple, inspiré par leur roi bon et pieux, ressent un engouement pour la Foi qui se renforce après l’élection de la Haute Septa qui est vue par tous comme un don des Sept eux-mêmes. De nombreux miracles lui sont attribués en l’espace de seulement quelques années.

Des vagues de conversions, souvent spontanées, ont lieu à Dorne et dans le Nord et de plus en plus de personnes, nobles et roturiers, se consacrent à la religion. Les dons à la Foi augmentent et le clergé des Sept se lance dans une politique d’investissements et de grands projets dont les opérations militaires en Essos ne sont qu’une petite partie.

Depuis que la Couronne a accepté que la Foi possède des terres en son nom propre, le clergé des Sept a acheté de nombreuses parcelles de terrain, allant de quelques acres à des fiefs entiers incluants des villages et des champs. Des septuaires sont construits sur ces terres et de nouvelles communautés religieuses se développent.

Conformément à la volonté du roi, des écoles sont construites pour éduquer la petite noblesse qui ne peut pas toujours bénéficier d’un septon ou d’une septa particulier pour leurs enfants tandis que, pour les grandes familles nobles, des garants moraux, issus du clergé des Sept ou des représentants de la foi des anciens dieux, leurs sont imposés.

Les travaux sur le grand septuaire voulus par Baelor commencent après de longs débats entre le Roi et la Haute Septa sur la vision à adopter. Sur les conseils de messire Renly Oldmill, des chapelles consacrées aux métiers des sept faces du Dieu Unique seront créées pour louer le travail des artisans, des musiciens, des magistrats, des médecins, des soldats, des conteurs, etc. A la demande de la Haute Septa, des jardins grandioses entoureront les bâtiments.

Le projet est revu à la hausse, poussé par des investissements considérables, et une véritable bataille de prestige commence entre la Foi et la Couronne, à l’insu de la Haute Septa et du Roi.

Mesures et réglementations

Répondant à une demande du roi Baelor, le maître des lois compila pendant l’hiver avec l’aide de mestre Finn de la maison Lyberr un code de la guerre pour s’assurer que les drames de la conquête de Dorne ne se reproduisent pas à l’avenir.

Un arrêté vit le jour dans le cabinet du maître des lois pour rappeler à tous les limites acceptables de l’art — sujets seyants et propos qui peuvent être moqueurs mais jamais insultants — et les punitions qu’un artiste peut encourir lorsqu’il brave ces limites. Notamment, cette loi n’accorde plus qu’aux seigneurs majeurs et au Roi la possibilité d’une condamnation à mort pour une insulte par un biais artistique. Enfin, des questions se posent sur la législation (gestion de la vassalité, taxes) des forteresses essosis et de manière générale des ressortissants du royaume établis sur Essos.

Pour sa part, le Grand Argentier a mis à profit la fin de l’hiver pour créer une nouvelle taxe sur la production, le commerce et la consommation d’alcool afin de renflouer les caisses royales et de lutter contre le vice. Le texte, assez complexe, détaille de nombreux cas en fonction du type d’échange, de la variété d’alcool (grains, raisins, fruits de verger), des processus de fermentation, des volumes produits, ou encore des types de baux liant l’exploitant à son seigneur. Il en résulte une augmentation significative des coûts pour l’import et l’export d’alcool, une légèrement augmentation des prix pour les produits communs et une mise en valeur de certaines ressources agricoles sur d’autres.

A l’initiative de lord Gilliam Lydden, une politique de valorisation des ressources forestières, notamment pour la construction navale, est à l’étude. Un poste de magistrat, responsable de la sylviculture, est créé pour lui.

Peu satisfait du fonctionnement de son Conseil restreint, le roi Baelor lui a imposé deux mesures pour le guider dans sa mission. Dans un premier temps, le Conseil restreint accueille en observateur et garant moral Sa Sainteté Lucerian ; ensuite il est attendu de chaque membre du Conseil restreint d’adopter, à l’instar de la famille royale, les deux fois principales du royaume en vénérant tant les anciens dieux que les Sept. Ces décisions ont été acceptées par l’ensemble des membres du Conseil même si certains, comme le seigneur Commandant de la Garde Royale, se sont exprimés sur la difficulté qu’ils avaient à suivre le roi sur cette voie.

Les sœurs du roi

Il y a trois ans, alors qu’il était en déplacement à Fort Salt, Sa Majesté Baelor a été marquée par l’horreur du monde, sa laideur et son impureté. Inquiet pour ses sœurs qu’il souhaite préserver à tout jamais pures, le roi a décidé de les faire enfermer dans le Donjon Rouge.

Injustifiée, inique et terrible, cette mesure est peut-être la plus impopulaire de toutes celles que le roi Baelor a prises. Toute la cour, sans exception, s’est élevée pour défendre les sœurs du roi, cependant ni la logique politique — elles sont après tout d’importantes ressources diplomatiques — ni la compassion n’ont réussi à atteindre Sa Majesté. Seule la Haute Septa que le roi considère pure a obtenu la permission de visiter les trois femmes.

La chanson de trop

Vers la fin de l’hiver, une chanson moquant lady Danae Vance de Bel Accueil, une femme proche de la reine-mère, et son chevalier protecteur, ser Leith Wecksmith, fut chantée quelques fois à la cour. Le texte parlait de manière équivoque d’une vieille dame qui ramassait n’importe quel chien errant dont les seigneurs voulaient se débarrasser, évoquant ainsi la disgrâce de ser Leith et la deuxième chance que lui avait donnée lady Danae en le prenant à son service.

La chanteuse, une des fondatrices des Rougegorges du nom de Lucia Lyberr, semblait particulièrement fière de son petit effet à la cour avec ces piques. L’affaire aurait pu s’arrêter là, cependant la reine-mère réagit avec véhémence en prenant à partie le roi qui, énervé que l’on puisse ainsi s’attaquer à une amie de la famille royale, se tourna vers sa Main Janos Grafton qui organisa rapidement un procès contre la chanteuse.

Le nouveau maître des chuchoteurs, qui n’est autre que le dirigeant des Rougegorges Darvon Falwell, prit comme il le put la défense de son amie mais la Main, implacable, la condamna à mort. Ce ne fut que grâce à la compassion de lady Danae, qui intercéda en faveur de la coupable repentante en demandant à ce que lui soit proposé de rejoindre les sœurs du silence, que le drame fut évité.

La question de la Féodalité

La question de la féodalité est très débattue depuis trois ans. Le seigneur Aedric Baratheon, après avoir subi de plein fouet l’arrogance des seigneurs du Conseil restreint, s’est positionné en première ligne pour défendre cette vision de la société issue de la tradition andale. Le roi ne devrait être que le premier parmi ses pairs, le pouvoir des seigneurs sur leurs terres ne devrait pas être contesté sans une raison extrême. Cette position est notamment soutenue par la Foi des Sept.

Le seigneur des Terres de l’Orage, s’il est le plus véhément dans son discours, a reçu des soutiens parfois inattendus de plusieurs seigneurs, notamment lord Edwyn Tully et lord Tytos Lannister. En tant que pairs du royaume, ils rejoignent en partie lord Aedric Baratheon : leurs voix devraient toujours être entendues du roi et le Conseil restreint ne peut se mettre au travers des droits et des responsabilités qui leurs incombent. Cependant, là où lord Aedric défend un pouvoir très fort des maisons majeures, ses soutiens insistent plus sur le besoin d’équilibre entre un pouvoir central et un pouvoir local.

Le pouvoir de la maison royale et du Conseil restreint s’est effectivement accru depuis la Danse des Dragons, notamment pendant les dix-sept années durant lesquelles le prince Viserys Targaryen a été Main des rois Aegon III et Daeron Ier. Même s’il n’est plus au pouvoir, le prince continue d’œuvrer pour façonner le royaume selon cette vision ; centralisée et guidée par un souverain puissant et incontesté.

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